Comment choisir la focalisation de son roman

Lorsqu’on prend la décision d’écrire un roman, la focalisation ou le point de vue du narrateur est l’un des aspects sur lesquels il faut le plus s’attarder. C’est un choix primordial, qui donnera une direction et un sens particulier à vos mots.

Alors pour commencer, quelle est la différence entre l’auteur et le narrateur ?

L’auteur est celui qui écrit le roman (vous en somme), et en dehors de la rédaction d’une autobiographie, celui-ci n’est pas présent dans son propre récit, qu’il dévoile à travers les mots, les sens pourrions-nous dire, d’un narrateur.

    Le narrateur est ainsi celui à travers lequel l’auteur décide de faire découvrir son récit. Une sorte d’intermédiaire. C’est donc ici qu’intervient la focalisation, ou le point de vue.

De quelle position le narrateur nous dévoile-t-il le récit ? Est-il l’un des personnages de celui-ci ? Observateur ? Omniscient ? Les trois focalisations sont ainsi les différentes places que peut avoir le narrateur dans une histoire.

Celles-ci ne sont pas à négliger ou à prendre à la légère. Chacune a ses avantages et ses inconvénients, et le choix de l’une d’entre elles doit toujours être longuement mûri.

Les 3 Focalisations ou points de vue

1. Interne :

Ici, le narrateur est aussi un personnage, à travers les mots et le ressenti duquel nous est dévoilée l’histoire. Petite précision : ce narrateur/personnage n’est pas nécessairement le héros de votre histoire. Dans les romans de Sir Arthur Conan Doyle par exemple, le docteur Watson est narrateur et personnage, bien que Sherlock Holmes soit le principal personnage. Dans ce genre de focalisation, on retrouve habituellement l’utilisation du « je ».

Narrateur = Personnage.

2. Externe :

Dans cette focalisation, on retrouve l’emploi du « il », ou du « elle ». Le narrateur ne participe pas à l’action qui se déroule, il ne fait que la commenter. Il peut aussi bien parler des attitudes que des émotions des personnages, mais en sait beaucoup moins que ceux-ci. Observateur méticuleux, il n’a pas de parti pris dans l’histoire, de laquelle il est évidemment absent.

Narrateur ˂ Personnage.

3. Zéro :

Lorsque ce point de vue est employé, le narrateur est un véritable Dieu. Il connait aussi bien les pensées et les actions des personnages, que leur passé ou leur avenir, bien qu’étant totalement extérieur à l’histoire. Cette focalisation octroie une vue d’ensemble et une connaissance omnisciente, qui donne un net avantage au lecteur (par l’intermédiaire du narrateur) sur les personnages.

Narrateur ˃ Lecteur ˃ Personnage.

Maintenant que nous avons passé en revue les différentes focalisations, rappelons qu’il n’y a pas de mauvais choix ; tout dépend de vous. Mais voyons un peu ce que chacune d’entre elles peut apporter à votre histoire.

Comment choisir la focalisation de son roman ?

  • La focalisation interne permet de connaitre intimement un personnage. On le sait et on ne le dira jamais assez, des lecteurs attachés émotionnellement, sont des lecteurs qui termineront votre roman (qui ne voudrait pas de ça ?). En plus, le point de vue d’un individu est toujours subjectif, mais très souvent, sans s’en rendre compte, le lecteur a tendance à faire confiance à la voix du narrateur. Parce que c’est celle-ci qui le guide dans l’univers du roman ; un peu comme un petit enfant tenant la main de sa mère dans un grand magasin.

Je suis persuadée que malins comme vous l’êtes, vous voyez où je veux en venir. Mais je vais tout de même l’écrire clairement : vous pouvez balader vos lecteurs. Après tout, la perception d’un individu n’est jamais que ça, une perception. Dans l’esprit d’un psychopathe, on peut facilement se prendre pour un sauveur de l’Humanité.

  • La focalisation externe quant à elle a l’avantage de donner la voix à plusieurs personnages, d’être objective. On peut en apprendre sur plusieurs personnages en même temps sans étiquettes ou préjugés, vu que le narrateur n’est pas impliqué dans l’histoire. Connaitre aussi bien la femme trompée, le mari infidèle que la maîtresse amoureuse. Là encore, les possibilités sont infinies. Cette focalisation donne de la profondeur à votre récit, parce que le lecteur peut aussi bien connaitre le « gentil » que le « méchant ». Ici, on peut nuancer les idées, faire vivre les histoires de plusieurs personnages en même temps, et par là même offrir aux lecteurs un plus large choix de personnages auxquels s’identifier et une compréhension plus objective de l’histoire.
  • La focalisation zéro est, comme dit précédemment, le point de vue des Dieux. Qui a des envies de mégalomanie ? C’est par ici ! Plus sérieusement, j’ai envie de dire qu’avec cette focalisation, c’est le lecteur qui se joue des personnages. Il sait ce que leur destin leur réserve, et attend de voir comment ils se sortiront des situations vers lesquelles il sait qu’ils se dirigent inexorablement. Mais si le narrateur sait tout, il ne partage pas forcément son omniscience avec les lecteurs. Tout ici est question de dosage, selon l’effet souhaité. Les polars et les thrillers peuvent gagner à être écrits avec cette focalisation.

Le lecteur peut ainsi découvrir dès le début du roman qui est l’assassin, mais ne pas connaitre le pourquoi du crime (ce que le narrateur saura évidemment, mais n’aura pas révélé). Ainsi, tout en ayant une longueur d’avance sur les détectives, le lecteur restera néanmoins attentif, pour découvrir le mobile du crime dont il connaitra pourtant déjà le coupable. L’usage de ce point de vue nécessite une véritable maîtrise de l’information et de sa distribution, qui n’est pas toujours à la portée de tous. Mais bien exécuté, la focalisation zéro offre de riches opportunités.

Maintenant que vous en savez plus sur les focalisations, à vous de jouer. Faites votre choix. Et si jamais vous hésitez, ne soyez pas rigide et faites comme moi : mélanger !

Oui, il est effectivement possible dans un même roman d’utiliser plusieurs points de vue. C’est ce à quoi je m’amuse tout au long de mon roman « Les Filles de la Table 4 ½ ».

Mon prochain article parlera d’ailleurs de l’usage des multiples points de vue dans le même ouvrage, en prenant notamment exemple sur mon roman. Ne le manquez pas si vous souhaitez en apprendre plus.

Bonne chance !

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